Le 1er février, nous accueillions avec enthousiasme Hervé Castanet, psychanalyste et auteur de l’ouvrage récemment paru sous le titre Neurologie versus psychanalyse[1], pour une conversation en visio-conférence. Elle fut suivie par près de cinq-cents spectateurs, soit un véritable succès, dont voici un petit écho.
C’est piqué au vif par l’annonce de l’obsolescence de la psychanalyse (et de tous les traitements par la parole) qu’H. Castanet entreprit de tordre le cou à ce qu’il a nommé « la thèse neuro ».
Les Psychologues freudiens avaient choisi d’intituler cette soirée « pas-tout neuro ». Gageons que cette formule fera date pour notre public, comme cela est le cas dès lors qu’une interprétation fait mouche.
S’il ne s’agit pas de nier les avancées de la science dans le champ neuro – le combat auquel il nous convie vise le tout-neuro –, il ne s’agit pas non plus de justifier l’efficacité de l’orientation psychanalytique. Car les preuves sont là et nous n’avons de cesse de les publier, de les communiquer et de les vérifier dans nos contrôles.
Pour mener ce combat et déconstruire la thèse neuro, une seule arme : l’épistémologie, « concept contre concept », et un seul objectif : demander aux neurosciences de répondre de leur volonté totalisante. Pour cela, un argument de poids qui est aussi le gage d’une éthique : « faire du champ théorique le lieu d’une pratique ». Il faudra, nous indique H. Castanet, « être respectueux, mais sans pitié » !
Comment discuter avec les partisans du tout-neuro, demandait Valérie Bussières, avec ceux-là même qui exhortent à la disparition de la psychanalyse, qui refusent la causalité psychique, qui forclosent la dimension du sujet, qui excluent ce dont on parle ? « On ne discute pas, on cogne ! » Ainsi, refusons-nous d’utiliser le concept de TND, car pourquoi parler la langue de l’Autre si c’est pour parler celle de celui qui veut vous faire taire ? « C’est parler une langue qui nous soumet », selon H. Castanet.
Déconstruire donc, mais comment ? Prenons le concept de santé et considérons-le comme il se doit, à savoir un concept idéologique, puisqu’il suppose une fin à atteindre. À ce titre, le projet ministériel de faire du psychologue un professionnel de santé doit nous alerter, car un concept a des conséquences cliniques. Le psychologue freudien ne succombera pas à la tentation d’être un psychologue en blouse blanche, subordonné au discours médical et à l’idéologie de la bonne santé.
Le microscope, indiquait Gaston Bachelard, dans une formule qui a « changé le monde » d’H. Castanet, ne prolonge pas la vue, mais le concept. On ne trouve donc que ce que l’on cherche, quelle que soit la technicité de l’appareil en question. « Le biologique, ce n’est pas le réel, l’imagerie, ce n’est pas le réel ».
Quel est l’avenir du signifiant psychologue, interrogeait Nathalie Georges-Lambrichs ? Cette question résonne avec celle que posait Jacques-Alain Miller lors du combat contre l’amendement Accoyer en 2004, « comment devrons-nous nous appeler pour continuer à faire ce que nous voulons ?[2]». Pourtant les signifiants psychologue et psychanalystene s’équivalent pas. Le psychologue freudien fait plutôt usage du signifiant psychanalyse, car elle est sa boussole, et de telle sorte que « l’inconscient objecte au savoir non troué ».
Dans un style enlevé, convaincant et résolument optimiste, H. Castanet nous fit une magistrale démonstration, invitant à s’appuyer sur l’enthousiasme que nous mettons dans notre travail, à rencontrer les sujets, au un par un et dans un combat éclairé.
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