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Véronique Outrebon

On prend les mêmes et... l'on recommence ?




Qui sont ces auteurs-experts consultés ?

« Les auteurs déclarent n'avoir aucun lien d'intérêt avec ce rapport » est-il mentionné, sans sourciller, en préambule du rapport.

Ainsi une douzaine de personnalités figure parmi les auteurs, à laquelle s'ajoute une vingtaine d'autres parmi celles auditionnées[1]. Certaines s'affichent dans l'une et l'autre liste.

Apparaît ici clairement, pour le dire avec J.-A. Miller, très freudien ici, « une clique [2] » dont les travaux convergent vers la médecine quantitative, les neurosciences et les thérapies cognitivo-comportementales.

Commençons par la figure de proue, J.-F. Allilaire, ce nom vous dit quelque chose ? Vous ne vous trompez pas, ce sont des retrouvailles car il était déjà présent en 2003 au cœur du rapport Pichot-Allilaire[3] qui concevait la psychothérapie comme un acte complémentaire de la prescription de psychotropes et que si elle était pratiquée à part par un psychologue, ne saurait en son fond valoir que sous la tutelle du médecin prescripteur, qui devrait rester aussi l’évaluateur. Il est un des auteurs du Livre blanc de la psychiatrie[4].

« L'incroyable stakhanoviste »[5] Allilaire, professeur de psychiatrie, dont « [l’]engagement scientifique depuis plusieurs années » est indéniable, précise sa biographie. Membre reconnu de plusieurs organisations et sociétés scientifiques, membre de comités de rédaction de plusieurs revues médicales il a été élu secrétaire perpétuel de l'Académie nationale de médecine, élection approuvée par le Président de la République.

Allilaire qui promouvait des « psychothérapies très codifiées » dont la formation serait dispensée par des instituts de formation, des instituts Allilaire, ainsi placés, en somme, sécurité oblige, sous contrôle psychiatrique[6].

J.-P. Olié autre grand ponte de la psychiatrie, donnons-lui la parole : « Parti de la psychanalyse, j’ai parcouru le chemin inverse pour finir par me spécialiser dans la mise au point des médicaments psychotropes.[7]»

L. Collet, au curriculum-vitae impressionnant ! Professeur de psychiatrie, conseiller d’état, dont la thèse a été dirigée par l'inamovible J. Cottraux que l'on retrouve parmi les personnes auditionnées, psychanalyste en son temps et grand éreinteur de la psychanalyse et à l'origine de la création du diplôme de Thérapies cognitivo-comportementales (TCC).

B. Falissard, polytechnicien, pédopsychiatre et biostatisticien dont les nombreux ouvrages et conférences soulignent son intérêt pour un rapprochement épistémique entre la psychanalyse, les neurosciences et les TCC de troisième génération[8]. Il avance, non sans humour, que si les psychanalystes s'opposent à l'évaluation de leur discipline c'est « qu'ils n'aiment pas les chiffres[9] ».

Voici pour les personnalités les plus en vue. Parmi les autres, pas un.e psychanalyste qui aurait pu donner de la voix, mais un « clan[10] », uni pour viser la psychanalyse au cœur. Ce qui en outre saute aux yeux, on le devine aisément, est une conception de plus en plus patente de neurologiser la psychiatrie, afin qu’avec l'aide de l'imagerie dont les progrès indéniables fascinent grâce à un discours biaisé, on vienne enfin à bout de tout ce qui se passe dans le cerveau d'un malade.

Nous voilà bien déconnectés du signifiant !

[1] p. 1&9 du rapport.

[2] Miller J.-A., le Nouvel Âne, Janvier 2004.

[4] Allilaire J.-F. et al., Livre blanc de la psychiatrie, Fédération française de la psychiatrie Ed., 2003.

[5] Miller J.-A., « Le clan des palotins », Le Nouvel Âne, op.cit.

[6] Lire Miller J.-A. op. cit.

[9] Falissard B., les résistances à la «(neuro)scientificité de la psychanalyse https://www.youtube.com/watch?v=fYqXmUCZATk

[10] Miller J.-A., op. cit.

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